Interview: Dan Sartain

Dan Sartain (de son vrai nom Daniel Fredrick Sartain) est un compositeur émérite, prolifique et reconnu. En Alabama, où il réside, il travaille comme barbier. Mais il est surtout un artiste poète, romantique et idéaliste. Son univers c’est les années 50 et 60, et il compose des morceaux classieux à la manière d’un Alan Vega ou d’un Chris Isaak. Aujourd’hui sort son dernier album, Western Hill, et il est superbe ! On peut ressentir dans sa discographie ses influences blues, rockabilly, surf ou garage, voire punk. Dan Sartain a gentiment accepté de se confier à moi, l’occasion de le retrouver  durant le confinement et de faire un point sur sa carrière déjà longue.

Photo: Sarah Marie Orr

Thee Savage Beat : Qu’écoutait le jeune Dan Satain ? Qu’est-ce qui a été déterminant pour lancer ta passion pour la musique ?

Dan Sartain : Dans ma jeunesse, le Hard Rock c’était le gros truc. On parle là d’Alice Cooper, ACDC, Van Halen, des trucs comme ça. Après ça j’ai beaucoup aimé la pop musique. MC Hammer et Vanilla Ice étaient vraiment cool. J’’écoutais aussi de la musique avec un côté plus sombre, comme les Geto Boys et Ice Cube.

Nirvana, tout ça, c’est apparu au moment où j’ai sérieusement commencé à jouer de la guitare. Avant le grunge, c’était vraiment intimidant d’aller dans un magasin de guitare. Après Nirvana, on avait pas besoin d’avoir des costumes sophistiqués ou du matériel coûteux. Je n’ai rien contre, c’est juste que je ne pouvais pas me permettre quelque chose comme ça. Ce qui a été déterminant pour moi est quand mon frère est entré dans la Marine au début des années 90. Il est revenu avec tous ces disques qui étaient populaires localement à San Diego. Je suis tombé amoureux de toute cette musique et je me suis finalement lié d’amitié avec la plupart de ces groupes. Cela nous a conduit à peu près où nous en sommes aujourd’hui.

Comment vis tu ces périodes de confinement ?

Il est vraiment trop tôt pour se sentir à l’aise et dire que tout cela n’est qu’une routine. C’est sympa de renouer avec ma famille, mais ça me manque de travailler. Je suis sûr que quelque chose de bon en sortira.

Comment actuellement les musiciens américains vivent t-ils cette situation ?

Je ne peux pas parler pour nous tous, mais j’en connais qui sont très énervés par la situation. Être en colère contre un virus, c’est comme être en colère contre Moby Dick ! Nous pouvons cependant être énervés par la situation. Je le suis.

En tant que poète, comment vois tu l’avenir de notre monde ? Penses tu qu’un changement de civilisation est possible après cette crise ?

Le jeune Dan Sartain connaîtrait la réponse, mais ce mec là ne connaissait pas ce que vraiment dire l’expression « être dans la merde ». Je pense que je suis assez intelligent maintenant pour savoir que je ne suis pas assez instruit pour spéculer sur quelque chose comme ça. J’imagine que du bon sortira de cet isolement. Je veux dire cela dans tous les domaines.

Photo: Sarah Marie Orr

On peut citer Jonathan Richman ou les Cramps et Elvis, Alan Vega parmis tes influences ? Y en a t-il d’autres ?

J’ai récemment parcouru tout mon catalogue. Je n’écoute pas du tout ça d’habitude. Une fois qu’un disque est fait et sorti, je ne l’écoute presque plus jamais. La dernière fois que j’ai sorti un disque c’était il y a environ cinq ans, donc j’ai le recul suffisant pour faire un bilan objectif. Et je peux dire que j’ai été très influencé vocalement par Ol Dirty Bastard et Jacques Brel.

Aujourd’hui sort sur bandcamp l’intégrale de tes albums, comment vois tu le parcours parcouru ?

J’étais un gars assez pleurnichard et autocentré. Je ne suis plus si angoissé. Je suis content d’avoir pu profiter d’un exutoire, et des gens pour m’écouter. Ce que je peux dire des enregistrements est que certaines des tonalités que nous avons retirées de cet équipement bon marché sonnent toujours très bien. Mes enregistrement, ça va du truc fait dans un garage au studio à 30,000 $ la journée. Je sais que beaucoup de gens se retrouvent avec du temps libre soudainement. C’est un bon moment pour creuser si vous êtes curieux.

Quels sont les morceaux de ton intégrale dont tu es le plus fier ?

Ce sont tous mes enfants et je les aime bien sûr tous pour différentes raisons. Too Tough to Live est peut-être celui dont je suis le plus fier. J’ai joué de la basse et de la batterie sur toutes les pistes de cet album. Il y avait quand même quelques invités de marque, mais je portais le poids d’un groupe de quatre . Celui-là est toujours très sympa à écouter de bout en bout.

Quelles anecdotes retiendra tu de 20 ans de musique, quels furent tes meilleurs souvenirs de concert ?

Quand je tournais avec l’un des groupes qui étaient des amis du label de Swami Records, je savais que nous étions en bonne compagnie et que nous nous battions pour la même team. Cette fois là à Glasgow, j’ai trouvé ce pot de hot-dogs marinés derrière la scène. Je tournais avec les Night Marchers. Ils avaient une chanson sur les hot-dogs et les choses sont devenues incontrôlables. Le groupe se servait des hot-dogs pour jouer des instruments. Il y avait partout de la sauce de hot-dog mariné. Le propriétaire du club est descendu au plus fort de tout cela. Il a juste regardé autour de lui et a secoué la tête et est remonté à l’étage. Je ne sais pas si les Night Marchers ont rejoué là bas depuis, mais je ne pense pas que j’y retournerais avec eux. Glasgow a toujours été une ville étonnamment amusante.
Il y a eu cette autre fois où Courtney Love s’est présentée à l’un de mes spectacles, mais c’était un spectacle du dimanche pendant la journée et elle l’a totalement raté. Elle est arrivée quand tout le monde était parti. Quand j’ai appris la nouvelle, j’étais un peu dégoûté, je n’ai pas pu la rencontrer.
Une fois, je me suis assis à côté de Kanye West lors d’une cérémonie de remise de prix! C’est une longue histoire, mais j’étais une doublure pour un autre artiste qui a été jugé peu fiable. Le gars pour qui j’étais la doublure s’est présenté, et les personnes qui ont organisé la cérémonie de remise des prix m’ont donné une bouteille de Jack Daniels comme prix de consolation, et ils ont dressé notre table juste à côté de Kanye West. Je voulais demander une photo mais je n’ai jamais eu le courage. Quand je suis rentré chez moi en Alabama, je suis retourné à Domino’s Pizza, où je travaillais, et personne n’a cru à l’histoire.

Quel est ton nouveau projet « Western Hills », on parle d’un album et d’un documentaire ?

Oui! C’est un album et un documentaire. Ma fiancée est venue et a filmée beaucoup de séquences studio. Nous avons juste continué à monter et à filmer. Avant de le savoir, on avait l’impression que nous avions quelque chose de plus que nous voulions. Cela a commencé à ressembler à un film réel plutôt qu’à du matériel promotionnel pour un album à venir. En fin de compte, c’est toujours ce que c’est, mais pour moi, c’est un témoignage important d’un moment important de ma vie. Je suis heureux de pouvoir enfin le partager avec tout le monde.

Quels sont les choses que tu aimes dans la vie ? que tu n’aimes pas ?

J’aime ma famille et la musique, j’aime aussi être barbier. Il y a des choses qui sont un peu communes. Mais une chose que j’aime dans la vie, c’est quand un restaurant fait une sauce spéciale. Je pense que les les restaurateurs qui utilisent des sauces en bouteille sont des fainéants. Je veux goûter la recette familiale de quelqu’un. J’ai la chance de vivre dans un endroit où les autres apprécient autant les sauces spéciales que moi. Je n’aime pas le mal. Je l’ai rejeté sous toutes ses formes. Alléluia.

Photo: Sarah Marie Orr

Quel le bilan que tu fais de tes 20 ans de musique ?

Je ne peux pas penser à une meilleure façon de passer cette période de ma vie. Je me suis fait des amis pour la vie partout dans le monde. J’ai eu la chance de faire n’importe quel style de musique que je veux, et j’ai eu le soutien de mes amis, de ma communauté et du label. D’après mon expérience, l’industrie de la musique a été beaucoup trop gentille avec moi depuis trop longtemps. Je leur en suis reconnaissant.

Quels sont les groupes actuels que tu aimes ?

Boy Harsher est vraiment bon.

Quels sont tes projets pour le futur ?

Je voudrais traverser le Pacifique, me marier, visiter Marfa Texas, élever ma fille pour en faire quelqu’un de meilleure que moi et diriger mon salon de coiffure jusqu’à ce que je sois trop vieux pour le faire ou mourir.

Photo: Sarah Marie Orr

Quels sont tes meilleurs anecdotes de première partie avec The White Stripes et The Hives ? les pires ?

Le pire, c’est que le public n’est vraiment pas là pour vous et qu’il a hâte que vous partiez. J’ai toujours eu plus de plaisir à jouer devant 100 personnes ou moins. C’est le genre de concerts auxquelles je me suis fait des amis. Lorsque vous jouer des spectacles devant des foules de plus d’une centaine de personnes, je n’ai pas l’impression que vous puissiez vraiment établir un lien personnel ou faire quelque chose d’unique. Je sais qu’il y a des artistes qui peuvent faire ça, mais je ne pense pas que je suis l’un d’eux.

Interview et traduction : Frédéric Quennec  (Relecture : Nicolas Quennec)

Facebook : https://www.facebook.com/DanSartainOfficial

Official website : https://dansartain.com/

Bandcamp: https://joindansartain.bandcamp.com

Publié par theesavagebeat

Ce blog propose des articles, principalement des interviews, sur des artistes ou groupes rock, punk rock et rock garage. Il est basé à Nantes (France). Le nom Thee Savage Beat est un hommage au groupe nantais Thee Death Troy ainsi qu’au titre des Dictators « The Savage Beat ». Ce blog est tenu par Frédéric Quennec et Nicolas Quennec.

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